Classification des hémopathies lymphoïdes

Commentaires du Pr Philippe Gaulard.
Département de Pathologie & Inserm U955, Hôpital Henri Mondor Créteil.

Les deux classifications des hémopathies lymphoïdes publiées en 2022, la classification OMS  et la classification consensuelle internationale (ICC), constituent une actualisation de la classification OMS publiée en 2016. Ces classifications ne sont pas contradictoires, ne comportant que des différences minimes. Globalement, elles constituent une actualisation de la classification antérieure (OMS 2016) et apportent des modifications relativement mineures dont l’impact sur la prise en charge des patients atteints de lymphome est assez limité. Une lecture plus approfondie autorise quelques commentaires pour les lymphomes les plus fréquents.

Pour les lymphomes diffus à grandes cellules B, de loin les plus fréquents, il n’y a pas de modifications majeures par rapport à la classification antérieure, si ce n’est quelques sous-groupes moléculaires mieux définis (comme ceux associés à des réarrangements du locus IRF4 ou des altérations 11q). Les techniques de biologie moléculaire permettent de distinguer au sein des lymphomes diffus à grandes cellules B centro-germinatifs (GC) et activés (ABC), des sous-groupes de pronostic différent, mais les implications cliniques restent difficiles à définir.

Les 2 classifications soulignent que les  lymphomes B de haut grade «double hit»  avec réarrangements MYC et BCL2, quel que soit leur aspect morphologique, proche d’un lymphome à grandes cellules ou au contraire d’un lymphome de Burkitt, doivent être considérés comme une entité biologiquement et cliniquement à part, imposant donc la recherche d’un réarrangement de MYC par FISH assez systématique, en tout cas chez des patients jeunes avec profil GC. En revanche, seule la classification ICC reconnait comme entité provisoire, les lymphomes B de haut grade  associés à des réarrangements de MYC et BCL6, en raison d’un pronostic péjoratif qui devra être confirmé sur de nouvelles études. En revanche, chacune des classifications insiste sur la faible reproductibilité du groupe des lymphomes B de haut grade « NOS », un diagnostic qui ne doit être considéré que dans les rares cas avec morphologie blastoïde incontestable.

Pour le lymphome folliculaire, le grade cytologique est facultatif selon la classification OMS, en l’absence d’impact clinique démontré des grades 1-2 et 3A.  L’OMS reconnait un lymphome folliculaire ayant des caractéristiques peu communes, difficile à grader (uFL). Cependant, il reste essentiel pour les 2 classifications de distinguer un lymphome folliculaire classique (cFL, grade 1-2 ou 3A OMS2016 et ICC 2022) d’un lymphome folliculaire à grandes cellules B (FL-3B), qui doit relever d’une prise en charge clinique identique à celle d’un lymphome diffus à grandes cellules B.  Il convient de souligner que ce diagnostic différentiel important pour la prise en charge clinique peut-être difficile sur micro-biopsie et peut requérir une biopsie exérèse.

Pour les lymphomes T, les classifications récentes n’apportent pas de nouveautés majeures. Elles permettent de mieux caractériser certaines entités, comme le lymphome TFH (follicular helper T-cell lymphoma), lymphome T le plus fréquent, qui comporte à côté du lymphome T angio-immunoblastique, une proportion non négligeable des lymphomes T périphériques autrefois classés en « sans spécificité (NOS) ». Ces lymphomes TFH partagent un phénotype CD4 avec expression de marqueurs TFH (CD10, PD1, ICOS, BCL6, CXCL13) et un profil génétique caractéristique associant volontiers des mutations de gènes de l’épigénétique (TET2, DNMT3A), de RHOAG17V et d’autres gènes de la voie du TCR. Les analyses moléculaires sont donc importantes pour le diagnostic qui reste difficile et non recommandé sur des micro-biopsies à l’aiguille.

Le lymphome Hodgkin classique reste inchangé, mais le lymphome de Hodgkin nodulaire à prédominance lymphocytaire est renommé lymphome à cellules B nodulaire à prédominance lymphocytaire, sans le terme Hodgkin, dans la classification ICC, pour souligner une biologie et une clinique différentes de celle du lymphome de Hodgkin classique.

Références

Campo, E. et al. The International Consensus Classification of Mature Lymphoid Neoplasms: a report from the Clinical Advisory Committee. Blood 140, 1229–1253 (2022).

Alaggio, R. et al. The 5th edition of the World Health Organization Classification of Haematolymphoid Tumours: Lymphoid Neoplasms. Leukemia 36, 1720–1748 (2022).

Laurent, C. et al. Impact of Expert Pathologic Review of Lymphoma Diagnosis: Study of Patients From the French Lymphopath Network. J. Clin. Oncol. 2017 Jun 20;35(18):2008-2017.

Liens utiles

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Contenu mis en ligne le 24/04/2014 – Dernière modification le 01/07/2023